La phobie comme gestion de l’angoisse
La phobie comme gestion de l’angoisse
Par Annie Birraux
Pour citer cette publication :
Birraux Annie, « Quelques notes à propos de la peur et de la phobie. De l’éloge de la phobie», Enfances & Psy 1/2015 (N° 65) , p. 25-32
La notion de phobie a quitté l’espace réservé de la psychopathologie pour envahir celui des comportements émotifs associés à la peur et c’est bien un problème, car on assiste, depuis plusieurs années, à une confusion entre phobies, anxiétés, angoisses, peurs, pusillanimités, au point d’en faire un amalgame, alors qu’il ne suffit pas d’avoir peur pour être phobique.
Il existe des éprouvés de peur qui ne relèvent pas d’une organisation phobique, parce que la peur n’est pas pathologique en soi, et que « sans elle, les hommes n’auraient pas survécu » (Delumeau, 1993). La peur est probablement une des premières émotions que ressent le nourrisson sans ressources devant les événements extérieurs. Elle est liée à des ressentis de danger et d’impuissance à maîtriser celui-ci. Il y a donc des peurs légitimes au cours de situations où la menace est imminente et ne laisse pas place à l’élaboration de mesures de protection et lorsque la survie du sujet est suspendue à un fil d’araignée. Mais la phobie n’est pas la peur. C’est une stratégie psychique de gestion de l’angoisse, c’est-à-dire d’un affect résultant d’un état pulsionnel conflictuel, laquelle stratégie transforme celle-là en émotion résultant d’une causalité externe : l’angoisse, ne trouvant pas de support d’élaboration dans la représentation de sa causalité, fait ainsi l’objet d’une projection sur un objet externe, ce qui permet au sujet de scénariser dans la réalité objective et palpable un conflit interne qui résiste à sa résolution.
La phobie est donc une forme de maîtrise de l’angoisse qu’elle transforme en peur, partageable par tous, mais ce qui la différencie en second lieu de la peur, c’est que l’objet phobogène n’est généralement pas dangereux. Aussi définit-on la phobie comme la crainte injustifiée et déraisonnable d’objets, d’êtres ou de situations dont le sujet reconnaît l’illogisme. On reconnaît aussi que ces conditions entraînent, comme dans la peur, une paralysie dans le champ de l’action et éventuellement une inhibition dans celui de la pensée.
Dans Éloge de la phobie (1983), j’ai montré que le mécanisme phobique était décrit par Freud comme une structure originaire de la pensée qui consiste à mettre à l’extérieur de soi ce qui est insoutenable ou non intégrable afin de rétablir une homéostasie interne compromise. Cette structure élémentaire, projective, peut se compliquer progressivement d’autres mécanismes de défense, dont le déplacement, sur lequel insiste en particulier Freud (1905) dans « Le petit Hans », mais, d’une manière générale, elle se donne à lire comme creuset de structures psychiques plus complexes, au point que, d’une part, l’idée qu’elle soutienne spécifiquement le symptôme d’une névrose qui porterait son nom est une hypothèse désormais caduque – les phobies simples ou graves appartiennent aussi bien aux séries psychotiques, limites, que névrotiques, néanmoins, le mécanisme projectif y est toujours à l’œuvre –, et que, d’autre part, ce mécanisme originaire de défense, malgré les formes plus complexes que le développement de l’enfant lui impose, participe du processus psychique de séparation et de l’appropriation du corps propre.
Ce qui distinguera la phobie de la peur, si l’on excepte la non-dangerosité de l’objet phobogène que l’on peut discuter en fonction des éléments subjectifs, c’est donc essentiellement l’existence d’un conflit interne qui, lui, se révèle dans des manifestations latérales d’inhibition, d’évitement et de manque de souplesse psychique, mais surtout dans le besoin d’objets contraphobiques, objets de dépendance, lesquels assurent la fonction d’objets subjectifs défaillants.
Phobies normales de l’enfance
Les phobies sont très fréquentes chez l’enfant. Elles sont réactualisées au cours de l’adolescence. Si la description des manifestations phobiques s’est, chez certains auteurs, multipliée à l’infini, mon propos n’est pas d’en faire catalogue mais de tenter de montrer que l’élaboration des premières phobies signe, en même temps que l’appropriation du corps propre, un premier temps du processus de séparation.
La capacité de l’enfant à constituer au cours de son développement une phobie vraie [1][1] A full blown phobia selon Anna Freud. est un argument en faveur d’une maturation pulsionnelle qui doit aboutir à l’intégration de l’interdit de l’inceste et de la castration prégénitale. Tout laisse à penser en effet que ce mode de gestion des premières angoisses, s’il est accompagné par les mots de l’adulte, ouvre au travail psychique ultérieur que la puberté impose après la latence. Or ce que nous constatons aujourd’hui dans les adolescences interminables et chez beaucoup d’adolescents « limites » est en lien avec les vicissitudes évolutives de ces premières phobies, comme si ces premiers symptômes n’avaient pu être élaborés. On peut penser que la banalisation médiatique de ces « peurs » de l’enfance y a contribué, exprimant, une fois de plus, une résistance aux théories sexuelles infantiles : n’est-il pas évident qu’aujourd’hui, la recherche, même en psychanalyse, semble avoir répudié l’« angoisse du huitième mois » aussi bien qu’elle déserte sensiblement les sphères de l’œdipe précoce ou prégénital, pour se focaliser sur les vicissitudes du narcissisme ?
Les manifestations phobiques chez l’enfant ont fait l’objet de nombreux travaux, bien qu’avant 18 mois, nous ayons peu de moyens de distinguer l’état anxieux de l’état phobique. L. Despert (1946) fait état des récits d’enfants qui expriment leur peur d’être mordus ou mangés, mais qui ne savent dire par qui ou comment, et cette énigme quant à l’objet phobogène est aussi celle qui est derrière le loup-garou ou les animaux qui peuplent leurs rêves : animaux dont Ajuriaguerra (1971) dit qu’ils sont interchangeables d’une terreur nocturne à l’autre, et que, quelle que soit leur taille ou leur forme, leur activité supposée est toujours la même : mordre, manger, poursuivre. L’énigme est aussi celle de l’ogre, des sorcières et des fantômes, et ce sont les analyses d’enfants plus grands ou d’adultes qui ont permis la théorisation de celle-ci.
Pour Jean Mallet (1969), le personnage qui se dissimule derrière ces objets phobogènes est « l’étranger » qui déclenche l’« angoisse du huitième mois », angoisse manifestée par des cris et des gesticulations motrices. Ces manifestations anxieuses témoignent d’une réaction de déplaisir lorsque la mère (ou l’objet libidinal qui est, à ce stade, total et identifié) se détourne de l’enfant. Certains auteurs ont évoqué l’idée que cette angoisse de l’étranger était liée à la déception de ne pas reconnaître le visage de la mère. Bien que je sois d’accord sur le fait que cette réaction fasse preuve d’une ébauche de jugement différentiel, je pense qu’à cet âge, il n’y a déjà plus de confusion possible, et que le visage maternel est tout à fait intégré. C’est la déception de devoir partager la mère avec un autre (connu ou inconnu) qui fait éprouver un sentiment qu’on appellera plus tard jalousie, et qui relève d’un éprouvé fortement angoissant d’une dépossession de soi par accaparation de l’autre. L’hypothèse de Spitz qui faisait coïncider l’émergence de l’angoisse avec la constitution de l’objet total n’est plus aujourd’hui retenue dans la mesure où il est évident que la pulsion n’a pas besoin d’objet total pour être liée et que les manifestations d’angoisse chez le nourrisson sont antérieures au huitième mois. Mais ce qui est à noter c’est que cet épisode du huitième mois donne la clé de l’angoisse phobique, à savoir qu’il s’agit de se débarrasser d’éprouvés dérangeants (de représentations inconciliables) qui viennent perturber la relation libidinale duelle que l’enfant a construite avec un objet d’amour, et que c’est par projection et progressivement, par déplacement, que « l’étranger », l’autre, l’ogre, l’animal petit ou gros, le cheval et son fait-pipi du petit Hans, deviendra le méchant, et sera celui sur lequel repose la responsabilité du malheur et de la souffrance de ne plus être unique pour l’autre.
Cette réaction initiale donne les clés de ce qui va se passer au cours de l’évolution de l’enfant, lorsqu’il prend conscience du statut particulier de la chambre des parents. Ce n’est plus seulement une situation de partage qu’il lui faut assumer, mais une situation d’exclusion qui l’excite et l’angoisse. Les phobies de l’enfance qu’on appelle « normales » vont rendre compte du traitement psychique de ces éprouvés dont le caractère sexuel, bien que dans le langage de la tendresse, est manifeste. C’est sur des situations qui peuvent être liées au sommeil ou au coucher que s’exprimeront surtout celles-là. Peur du noir, de l’endormissement, du loup caché sous le lit, etc. Ces symptômes, s’ils expriment une défense contre les désirs incestueux, traduisent aussi l’impuissance du moi à contenir la pulsion et informent sur les scénarios qui tentent de la juguler. Sur la scène externe, ils dévoilent la fragilité face aux menaces sinon d’abandon au moins de séparation, mais, d’évidence, une angoisse que l’on qualifiera ultérieurement dans la situation triangulaire œdipienne, « de castration ». Ces phobies s’atténuent pour disparaître spontanément, la plupart du temps, ce qui témoigne de l’intégration, par le sujet, de la place de chacun (interdit de l’inceste) en raison de la consolidation narcissique (plus grande estime de soi). Mais il ne va pas de soi qu’elles soient pour autant élaborées, c’est-à-dire qu’elles aient laissé place à une symbolisation non aliénante qui permette à l’enfant d’accepter son statut et les aléas de celui-ci, à savoir sa non-toute-puissance et, dans le même ordre d’idées, l’impossible maîtrise des affects de l’autre autant que de sa disponibilité.
Phobies d’enfance et angoisse de séparation
Je l’appellerai Lucile : des yeux immenses et bleus, une carnation d’une blancheur inouïe et de longs cheveux que son port fluet et gracieux faisait virevolter maladroitement quand on s’adressait à elle. Lucile aurait pu se donner à voir comme une enfant sans mystères, jolie, gracieuse, mais elle se montrait fermée comme un coquillage, tripotant ses mains et ses cheveux, et son angoisse perlait non seulement dans son attitude mais dans ses relations. Elle répondait aux questions avec réticence et laissait parler sa mère qui raconta que sa consultation était motivée par « sa » phobie scolaire. Lucile avait 8 ans, on avait tout cherché et on ne trouvait pas pourquoi elle était malade quand il y avait école. Elle avait mal au ventre, elle vomissait, elle avait mal à la tête ou, tout simplement, ne se sentait pas bien parce que ça sentait mauvais à l’école. Elle avait subi beaucoup d’examens, on lui avait même fait un électroencéphalogramme à cause des odeurs qui lui donnaient la nausée, mais on ne trouvait rien. Le médecin scolaire avait dit que c’était psychologique.
Dans le récit de l’histoire de Lucile, il y avait l’histoire de la mère que le père avait quittée quand l’enfant avait 2 ans. C’était une enfant plutôt vive, qui, selon la maman, à partir de la séparation parentale, manifesta des difficultés d’endormissement et des protestations lorsqu’on la déposait chez sa nourrice. La maman résolut le problème en la faisant garder par sa propre mère, laquelle, en raison du divorce, se rapprocha géographiquement de sa fille, à la demande de celle-ci. Elle solutionna aussi le problème d’endormissement en lui faisant partager son lit désormais trop grand pour elle. Malgré les mises en garde du pédiatre, cette maman défendait l’idée que son attitude était la bonne, confondant sans doute sa propre souffrance avec celle de l’enfant qui, elle, continuait de voir son père, soucieux, lui, de ce repli sur la famille de sa femme. L’école maternelle ne fut envisagée que lorsque Lucile eut 5 ans, et donna lieu à des problèmes d’adaptation qui se résolurent du jour où l’enfant découvrit qu’une des femmes de service de l’école était une voisine dans leur immeuble d’habitation. La thérapeute apprit ultérieurement que les difficultés de Lucile étaient bien antérieures à la séparation des parents. La mère se souvint, lors d’un entretien, que Lucile n’avait pas beaucoup d’appétit, et surtout qu’elle pleurait toujours lorsqu’elle voulait la faire garder, ce qui irritait alors son mari, et cela fut noté par le pédiatre comme un signe de non-accordage affectif.
Chaque rentrée était un calvaire. Lucile changea deux fois d’école, sans que la situation ne s’améliore. La mère tentait d’anticiper les problèmes à venir en aménageant des solutions à la mesure de ses propres fantasmes : accompagnements programmés, repas chez sa grand-mère, etc., mais, paradoxalement, elle refusait les conseils du pédiatre en défendant bec et ongles l’idée que « les conseils qui valaient pour les autres ne valaient pas pour Lucile qu’elle connaissait bien ». Lucile était souvent malade, les absences étaient nombreuses et l’école s’inquiétait, ce qui déclencha chez la maman un parcours d’investigations médicales qui resta muet sur une quelconque étiologie somatique. Mère et fille atterrirent donc, dans cette impasse, chez la psychologue ; Ce n’était pas un choix, mais une contrainte pour la mère qui pressentait une mise à l’épreuve de ses propres convictions sur le symptôme de Lucile, qu’elle continuait d’attribuer au départ du père. Quand on lui parla de phobie scolaire, elle chercha dans tous les livres de psychopathologie ce qu’on en disait et monta un dossier pour le pédiatre dans lequel elle mettait en exergue les caractères différentiels des problèmes de Lucile en regard de ce qui était dit de la phobie.
L’histoire de Lucile modélise la clinique des phobies précoces et la problématique de la séparation qui continue d’être le paradigme explicatif des phobies précoces de l’école qui se confondent avec les angoisses de séparation. Celles-ci, avec le développement de l’enfant, prennent d’autres formes, mais je ne reviendrai pas sur la complexité des problèmes qu’elles soulèvent me réservant de me centrer sur ce premier avatar de l’appropriation du corps et de la formation du moi.
Séparation et appropriation du corps
Bowlby (1978), s’appuyant sur des observations éthologiques, émet l’hypothèse que la phobie est en relation avec les comportements innés d’attachement de l’enfant à sa mère. Il existerait selon lui des personnes de tous âges et des deux sexes qui continueraient de manifester un comportement d’attachement inhabituellement fréquent et aigu à la figure maternelle primaire, sans que les qualités particulières d’une situation ne le motivent. Lorsque cette tendance s’exprime de manière excessive et répétée, elle est qualifiée de névrotique. Ce que Bowlby tient à mettre en évidence, c’est que la fixation névrotique aux figures d’attachement est la conséquence d’une crainte que celles-ci soient inaccessibles ou indifférentes lorsque l’enfant y fait appel. La stratégie qui consiste à rester dans l’entourage d’une figure d’attachement envers laquelle la confiance n’est pas pleine et entière semble donner raison à tous les théoriciens qui ont noté la problématique sadique anale des phobiques et leur désir de maîtrise. On retrouve ce constat chez Melitta Sperling (1972) qui découvre au cours du traitement d’une jeune patiente qui lui a été adressée pour une phobie scolaire que celle-ci ne supporte pas la classe, non pas parce qu’elle est éloignée de sa mère, mais parce qu’elle ne peut contrôler ce que fait celle-ci. La psychothérapie de Lucile permit de vérifier cette hypothèse : après avoir exposé ses malaises somatiques pendant plusieurs mois et concentré son discours sur l’impuissance des spécialistes – discours vraisemblablement emprunté à sa mère – Lucile accorda de moins en moins d’importance à ses malaises pour s’interroger sur ce que faisait sa mère quand elle était à l’école, sur le besoin de la surprendre quand elle était à la maison et sur ses idées les plus angoissantes qui tournaient autour de « retourner dans sa chambre et dans son lit quand elle serait guérie ».
Il me semble cependant que la dépendance aux figures d’attachement qui s’exprime dans la manipulation des objets contraphobiques de réassurance narcissique ne peut être, comme le suggère Bowlby, une attitude induite ou conditionnée par l’insécurité du lien à l’objet, mais plus directement par la fragilité du moi et l’impuissance de l’enfant à se satisfaire d’un environnement qui exige de lui non pas nécessairement plus que ce qu’il peut donner mais sûrement plus que ce qu’il veut supporter.
Chez Lucile, et selon sa thérapeute, l’inhibition de la pensée et de l’investissement scolaire était en lien avec son besoin exagéré de contrôle et avec ses fantasmes omnipotents qui témoignaient d’une non-inscription dans l’œdipe. La place qu’elle s’octroyait était celle que commande le désir d’avoir barre sur la vie et la mort du parent et donc de ne pas le quitter. Mais la psychopathologie, ici, a deux versants actifs : le confort de Lucile dont les bénéfices secondaires dans cette situation étaient considérables, et le désir d’une mère de s’approprier sa fille – elle décrivit son désir de la soustraire au père quittant la maison comme on décrit un rapt : elle l’avait réveillée et emmenée alors en province chez ses parents pour la soustraire à ce père et satisfaire un désir régressif de corps à corps maternel, de symbiose, contre lequel Lucile manifesta précocement mais dont elle ne pouvait s’abstraire.
Au cours de sa thérapie, après un temps de « requalification » du père (que le thérapeute reçut avec Lucile) et un séjour chez celui-ci, Lucile déclencha un eczéma des bras et des mains dont elle rapporta que c’était comme la maladie de sa mère, effectivement souffrante de ce type de dermatose depuis plusieurs années. Lors de cet épisode, ses dessins et productions étaient très angoissés et les histoires qu’elle dessinait mettaient en scène des lits cassés, des maisons en ruine, des personnages informes attachés les uns aux autres ou incomplets ce qui amena le thérapeute à verbaliser ce qui semblait se passer dans sa tête alors qu’elle devenait grande et qu’elle devait apprendre à ne plus être un bébé. La réaction entraîna un épisode dépressif qui fut parlé. L’eczéma disparut et l’évolution s’avéra spectaculaire après quelques semaines. Lucile reprit sa scolarité dans une autre école. Elle venait d’avoir 10 ans.
Quelques années plus tard, elle reprit contact avec son thérapeute. Elle avait 14 ans et c’est une dysmorphophobie qui l’amena à consulter à nouveau. Lucile était devenue une très belle adolescente, mais elle sentait que « ça allait recommencer ». Elle voulait dire par là que ce qu’elle ressentait et qui s’exprimait par l’impossibilité de se déshabiller quand elle allait à la piscine avec sa classe pouvait l’amener à s’exclure à nouveau du système scolaire et elle ne le voulait pas.
Conclusion
J’ai voulu montrer que la phobie n’est pas la peur mais une stratégie de gestion de l’angoisse, qu’elle est un symptôme « normal » dans le développement de l’enfant et de l’adolescent, en ce sens qu’elle est un temps d’intégration de l’œdipe, prégénital et génital, et que son élaboration est partie prenante de l’appropriation du corps et du processus de séparation. À cette occasion, j’ai rappelé le paradigme de l’angoisse du huitième mois et tenté de montrer comment les vicissitudes de son élaboration ne sont pas sans lien avec l’évolution des phobies précoces.
L’histoire de Lucile montre aussi que les angoisses œdipiennes de l’enfance, même élaborées, sont réactivées à l’occasion de la poussée pulsionnelle de la puberté qui les colore de génitalité et que, sous des formes symptomatiques différentes, elles mettent en scène la même problématique interne.
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Bibliographie
Ajuriaguerra J. de, 1971. Manuel de psychiatrie de l’enfant, Paris, Masson.
Birraux, A. Éloge de la phobie, Paris, Puf, 1993.
Bowlby, J. 1978. Attachement et perte, Paris. Puf.
Delumeau, J. 1993. Le péché et la peur, Paris, Fayard.
Despert, J.L. 1946. « Anxiety, phobias and fears in Young children », Nerv. Child., n° 5, p. 8-24.
Freud, S. 1905. « Analyse de la phobie d’un garçon de 5 ans (Le petit Hans) », dans Cinq psychanalyses, Paris, Puf.
Mallet, J. 1969. Les phobies, Paris, Payot.
Sperling, M. 1952. « Animal phobia in a 2-year-old child », The Psychoanalytic Study of the Child, n° 7, p. 117-125.
Sperling, M. 1972. « Les phobies scolaires et leur traitement », Revue française de psychanalyse, n° 2, p. 265-286.
Spitz, R. 1968. De la naissance à la parole, Paris, Puf.