La construction des catégories diagnostiques de maladie mentale

Par : Cédric Brun, Steeves Demazeux, Pierangelo Di Vittorio, François Gonon, Philippe Gorry, Jan Peter Konsman, Fanny Lung, Yannick Lung, Michel Minard, Matthieu Montalban, Nicole Rumeau et Andy Smith

Pour citer cet article :
Cédric Brun, Steeves Demazeux, Pierangelo Di Vittorio, François Gonon, Philippe Gorry, Jan Peter Konsman, Fanny Lung, Yannick Lung, Michel Minard, Matthieu Montalban, Nicole Rumeau et Andy Smith, « La construction des catégories diagnostiques de maladie mentale », Revue de la régulation [En ligne], 17 | 1er semestre / Spring 2015, mis en ligne le 30 juin 2015. URL : http://journals.openedition.org/regulation/11299 ; DOI : 10.4000/regulation.11299

Résumé :

Dans le cadre d’une approche d’économie politique, l’article propose une analyse de la construction sociale des maladies et des marchés dans le champ de la santé mentale, en lien avec les débats récents sur la classification des maladies mentales relancés autour de la publication du DSM-5. En prenant l’exemple du trouble du déficit de l’attention et de l’hyperactivité (TDAH), l’analyse du travail politique des différents acteurs (firmes pharmaceutiques, associations de familles de patients, assurances sociales, école, État, système de santé, etc.) permet de préciser leurs rôles à travers l’analyse comparative de la France et des États-Unis. L’étude de la production du discours scientifique sur la maladie précise qu’au-delà des questions éthiques, c’est une économie du financement de la recherche et de la publication scientifique qui participe au jeu des acteurs.

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Mots clés :

DSM, économie politique, industrie pharmaceutique, psychiatrie, santé mentale, TDAH

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Notes des auteurs :

Cet article s’appuie sur une recherche qui a bénéficié du financement du Conseil régional d’Aquitaine (projet C2SM), de l’Institut des sciences de la communication (CNRS) et de l’IdEx Bordeaux (programme financé par l’ANR, n°ANR-10-IDEX-03-02).

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Introduction

Selon certaines sources [1] , près de la moitié de la population des États-Unis souffrirait de troubles mentaux, la proportion étant plus faible en France mais significative (25 à 33 %). Ce constat d’une souffrance psychique importante, voire accrue, est paradoxalement partagé par deux courants a priori divergents. D’une part, par une approche sociologique, souvent critique, de la santé mentale [2] qui contextualise une difficulté d’être soi dans nos sociétés contemporaines, difficulté qui se caractériserait par une dilution du lien social, alors que l’exigence d’autonomie et de performances pesant sur les individus se renforce, générant des souffrances du fait de risques psychosociaux accrus et de nouveaux troubles mentaux – voir les travaux de C. Dejours (2009), d’A. Erhenberg (2012) ou P. Di Vittorio (2013, 2014). D’autre part, par une approche plus biologisante de la maladie mentale associée à la diffusion des nouveaux artefacts de la psychiatrie que sont les classifications des troubles mentaux et les médicaments, qui a conduit à une inflation, voire à une hyperinflation du diagnostic ou, comme dans la finance, à la formation de bulles (Batstra, Frances, 2012 ; Frances, 2013 ; Gonon, 2011). Pour dépasser l’opposition entre ces approches, il nous semble nécessaire d’appréhender moins l’institution psychiatrique en elle-même que le processus d’institutionnalisation du champ de la santé mentale à travers le rôle des différents acteurs, dans la construction comme dans l’utilisation des différents artefacts – au sens de Simon (1969). Le champ de la santé mentale et de sa prise en charge psychiatrique relève en effet d’un processus de construction sociale de la reconnaissance d’un ensemble de comportements comme pathologiques et de leur nécessaire traitement médical. Si les sciences médicales s’inscrivent dans le social (Freidson, 1970), le rapport de la psychiatrie avec le social est encore plus évident et immédiat, de nombreux malades étant tout à la fois ou alternativement pris en charge par les dispositifs de protection sociale et/ou ceux du système de santé et de l’assurance maladie. Ce champ s’autonomise et se reproduit en s’institutionnalisant sous le travail d’un ensemble d’acteurs sociaux aux intérêts plus ou moins contradictoires et par la production de savoirs et de représentations qui structurent les pratiques et finissent par faire reconnaître un ensemble de comportements et de souffrances psychiques comme relevant de la « santé » et non du « social ». Ainsi, est redéfinie, par la pratique et les représentations et savoirs mobilisés, la frontière entre le normal et le pathologique (Canguilhem, 1943), qui est aussi une frontière entre comportement normal et comportement déviant, au regard des normes changeantes de la société. On doit notamment à Michel Foucault d’avoir mis ce champ dans une perspective historique à travers son Histoire de la folie à l’âge classique (Foucault, 1972), décrivant les transformations du rapport de la société à la maladie mentale. Ces savoirs et ces représentations, notamment les catégories nosologiques et les mécanismes physiopathologiques censés être sous-jacents aux symptômes, sont mobilisés dans les pratiques professionnelles, mais aussi dans le travail politique visant à modifier les règles qui encadrent ces pratiques et dans la médiatisation des discours. C’est particulièrement le cas de la classification des troubles mentaux qu’institutionnalise depuis plusieurs décennies, plus encore que la classification internationale des maladies (CIM) publié par l’Organisation mondiale de la santé, le DSM (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) réalisé par l’Association américaine de psychiatrie (APA). À la fois manuel de diagnostic, outil de formation et de recherche, le DSM est devenu la bible de la psychiatrie nord-américaine, voire mondiale, mais aussi l’objet de toutes les attaques et de nombreuses critiques [3] . L’histoire des différentes versions du DSM (Demazeux, 2013 ; Minard, 2013) regorge d’exemples de ce travail politique, qu’il s’agisse du mouvement gay et lesbien pour sortir l’homosexualité de sa catégorie de trouble mental dans le DSM-III (1980) – aujourd’hui la lutte s’est déplacée vers la question du transgenre – ou encore du mouvement des vétérans de la guerre du Vietnam qui a abouti à introduire la notion de stress post-traumatique dans cette même version du DSM. Ce processus d’introduction va supposer à la fois l’invention d’une catégorie nosologique susceptible d’engendrer une niche de marché, mais également un processus politique pour faire reconnaître le type de prise en charge ad hoc. Les acteurs font appel au politique pour défendre leurs intérêts dans l’espace public, en effectuant un travail de problématisation, c’est-à-dire en construisant un argumentaire visant à montrer en quoi leur problème privé relève d’une question d’intérêt général tout en constituant des coalitions. Cette politisation passe par la mobilisation de valeurs (« la santé », « le bien-être des patients », etc.) ou par un processus de technicisation, c’est-à-dire d’arguments techniques, « indiscutables », « scientifiques », bref une forme de politisation dépolitisante (Jullien et Smith, 2011). Ce qui implique le recours à une expertise professionnelle, puis sa validation par l’État (notamment pour l’inscription du traitement au remboursement, pour la mise en œuvre de recommandations à l’usage des professionnels de santé, voire de politiques plus ambitieuses, etc.). Lorsque la décision politique intervient, elle institue de fait des règles qui sélectionnent certaines pratiques et catégories comme légitimes. Dès lors, la construction sociale d’une maladie est étroitement associée à celle d’un marché (Coriat, Weinstein, 2005), faisant intervenir tout un ensemble d’acteurs qui cherchent à faire prévaloir leurs intérêts. Ce processus a été analysé à travers le disease mongering [4] , à savoir une « marchandisation d’une maladie » qui consiste à faire reconnaître une nouvelle maladie et à construire un marché autour de la prise en charge de cette maladie. Il s’agit donc à la fois de la construction sociale d’une maladie et de la construction d’un marché. Le disease mongering procède donc à une extension de la nosologie dans le but de traiter de nouveaux patients atteints de cette nouvelle maladie (Moynihan, 2006). Dans sa version élémentaire, le disease mongering serait une stratégie de l’industrie pharmaceutique qui, de la sorte, s’assurerait des marchés de plus en plus importants, voire créerait de toutes pièces ces marchés. Ainsi, la frontière entre le normal et le pathologique serait redéfinie dans le but de satisfaire aux objectifs de rentabilité de l’industrie. Il s’agit bien d’une stratégie de filière inversée (Galbraith, 1967), c’est-à-dire une stratégie de « fabrication » de la demande par l’offre, dans le but de contrôler le marché et d’assurer sa croissance régulière. C’est donc une forme de création de marché, une construction sociale des marchés et des maladies par les firmes. Depuis Berger et Luckmann (1966), les travaux autour de la construction sociale en général (Searle, 1995), et plus particulièrement sur la construction sociale des marchés (Granovetter, 1985 ; Fligstein, 2001) se sont développés. Ils s’intéressent au caractère en partie arbitraire, historique et institutionnalisé des formes marchandes, produites de rivalités entre acteurs industriels, État, consommateurs et salariés, critiquant ainsi le caractère « naturel » des marchés. Traditionnellement, la filière inversée s’explique par l’usage de la publicité et du marketing, qui auraient pour fonction de créer des modes ou des désirs chez les consommateurs. Dans l’industrie pharmaceutique, si la publicité directe au consommateur existe dans certains pays (les États-Unis pour l’essentiel), elle ne l’est pas dans la plupart des pays. De plus, le patient est rarement celui qui décide de prendre un médicament, puisque le pouvoir de prescription (au sens de Hatchuel, 1995) appartient aux médecins, généralistes ou spécialistes. Dans le champ de la psychiatrie, où il n’existe pas (pour le moment ?) de marqueurs biologiques susceptibles d’être associés à un « trouble mental », la question du disease mongering mérite d’être reposée dans un cadre plus large que celle du rapport patient-industrie, comme un processus plus global et plus complexe, impliquant à la fois les associations de patients, les professionnels de santé et l’industrie qui, elle, alimente et appuie les deux autres types d’acteurs dans leur travail politique auprès des autorités publiques de santé (Gorry, Montalban, 2014). S’appuyant sur les principaux résultats d’un programme de recherche s’attachant à étudier la construction des catégories de la santé mentale et auquel ont participé les auteurs, l’article vise à préciser ce processus de construction sociale des maladies et des marchés dans le champ de la psychiatrie en précisant, dans une première partie, le rôle des différents acteurs, leurs relations et leurs intérêts, puis les institutions de ce champ pour comprendre la forme de travail politique qui s’y pratique. Pour exemplifier ces processus, nous prendrons les cas du trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH), qui a fait l’objet de nombreux débats en France (Gonon, 2013b). Ce cas illustre le jeu complexe d’un ensemble d’acteurs de la psychiatrie, de l’institution scolaire, des familles, des groupes pharmaceutiques qui ont fait surgir une maladie et un marché en quelques années. La polémique engendrée par une étude de l’INSERM (2005) sur les troubles de conduites du jeune enfant – qui avait servi de caution aux projets de prévention du gouvernement [5]  – conduit à s’interroger sur la médiatisation des résultats scientifiques en se focalisant sur le cas des neurosciences, présentées par certains comme la voie de l’avenir. Dans ce travail politique, la construction d’un discours scientifique « dépolitisant » l’objet de l’hyperactivité a été une étape essentielle car elle a contribué à légitimer la position de tel ou tel acteur en « objectivant » leurs intérêts. Dans cette perspective d’analyse des conditions concrètes de ce processus de « dépolitisation », la deuxième partie de l’article démonte les mécanismes d’un processus de médiatisation d’une publication scientifique en s’intéressant à la façon dont certains acteurs contribuent à cette production d’articles scientifiques et/ou utilisent les résultats, résultats parfois précaires, avec une attention toujours particulière sur le TDAH.
  1. Le jeu des acteurs impliqués dans la production des catégories de la santé mentale : le cas du TDAH

1L’objectif est de comprendre les modalités de la progression du diagnostic du trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH) parmi les enfants et de son traitement par un médicament (le méthylphénidate), c’est-à-dire d’étudier le processus de construction de ce marché par la reconnaissance du trouble. Pour cela, nous avons comparé les expériences nord-américaine et française qui, à bien des égards, sont aux antipodes l’une de l’autre : marché très important aux États-Unis, nettement plus réduit en France mais en progression rapide. Si la consommation de méthylphénidate (Ritaline et autres marques) a été multipliée par 10 de 2002 à 2011, elle reste limitée en France : avec un chiffre d’affaires annuel de 12,5 millions d’euros, elle est marginale pour l’industrie pharmaceutique, représentant moins de 0,5 % du montant des dépenses de psychotropes remboursées par la CNAM. Cette construction du marché s’explique en partie aux États-Unis par la revanche historique de la psychiatrie « scientifique » sur la psychanalyse (qui est restée plus présente en France), mais aussi par le rôle des écoles et des politiques d’éducation, ainsi que par le marketing développé par l’industrie. En France, le décollage récent de ce marché tient plus au rôle d’une association de parents de patients et de quelques pédopsychiatres.

Tableau 1

Acteurs États-Unis France
Chercheurs académiques Forte implication de la communauté scientifique dans les débats sur le TDAH Présence limitée des hospitalo-universitaires sur le TDAH
Corps médical Orientation organiciste (biologisante) forte Influences psychanalytique ou institutionnelle encore très présentes en pédopsychiatrie
Prescription du méthylphénidate par les généralistes Prescription hospitalière du méthylphénidate
Industrie pharmaceutique Publicité autorisée et lobbying intense de l’industrie Pas de publicité autorisée pour les médicaments
Actions possibles par les visiteurs médicaux
Associations de famille de patients Soutien financier des associations de famille de patients par l’industrie pharmaceutique Orientation principale sur la reconnaissance du trouble
École Sollicitée par les firmes pharmaceutiques Quasi-absence de détection du trouble
Détection quasi-systématique du trouble École publique non évaluée sur les performances de ses élèves
Évaluation des écoles par les performances scolaires des élèves
Protection sociale Ouverture de droits sociaux supplémentaires après diagnostic Régime général : pas d’intervention spécifique
Assurance(s) maladie Remboursement précoce de la molécule Régime général : pas d’intervention spécifique
  • Le TDAH, une catégorie aux contours contestés ; des controverses paradigmatiques entre psychiatres aux controverses sociétales
Au sein du champ de la psychiatrie coexistent en effet des praticiens dont les pratiques et les référentiels théoriques divergent, référentiels qu’on peut schématiser entre deux positions polaires : d’un côté, une psychiatrie plutôt d’origine psychanalytique, qui défend une thérapie psychodynamique, par la parole et de l’autre, une psychiatrie biomédicale à vocation scientifique, plutôt organiciste et favorable à l’usage de psychotropes (Lakoff, 2006). Entre les deux, on trouve un ensemble de positions intermédiaires qu’il s’agisse de la psychothérapie institutionnelle (d’origine psychanalytique) ou des thérapies cognitivo-comportementales, héritières lointaines du comportementalisme. Les catégories utilisées par ces praticiens divergent du fait des différences théoriques auxquelles ils se réfèrent et, de ce fait, les prises en charge également. Le concept de TDAH s’est forgé surtout à partir des travaux issus de la psychiatrie de tendance organiciste (Lange et al., 2010). Furent reconnus ainsi des troubles ressemblant au TDAH comme celui « d’enfants hyperkinétiques », de « syndrome hyperkinétique » ou encore « d’atteintes cérébrales mineures » décrits dès le début du xxe siècle. Le syndrome hyperkinétique figurait dans le DSM-II (1968), et l’hyperkinésie était le critère diagnostic majeur. Avec le DSM-III (1980), la dimension « déficit attentionnel » est introduite, avec ou sans hyperactivité. Dans la version révisée en 1987 (DSM-III-R), déficit de l’attention et hyperactivité (TDAH) sont fusionnés en une catégorie. Avec le DSM-IV, (1994) il est défini par de nombreux critères, décrivant soit un manque de concentration, soit une tendance à l’instabilité motrice et à l’impulsivité (« bouge tout le temps »). Alors que les promoteurs du DSM-IV anticipaient une progression d’environ 15 % de ce diagnostic (Frances, 2013), c’est une véritable inflation du diagnostic qui va être constatée sous la pression des laboratoires pharmaceutiques [6] . Aux États-Unis, cette explosion du diagnostic de TDAH s’accompagne d’une croissance encore plus rapide des ventes de méthylphénidate. Le pourcentage d’enfants recevant une prescription de psychostimulants est passé de 0,7 % en 1987 à 2,9 % en 1997 aux États-Unis (Olfson, Gameroff, Marcus, & Jensen, 2003). L’augmentation a ensuite été moins rapide progressant de 2,4 % en 1996 à 3,5 % en 2008 (Zuvekas & Vitiello, 2012). Dans le même temps la prescription de méthylphénidate a aussi été multipliée par 5 : le marché associé au traitement du TDAH représentait 8 milliards de dollars en 2011, contre 70 millions de dollars au début des années 1980. Un autre indicateur de l’importance prise par ce marché pour les firmes pharmaceutiques est l’explosion du nombre de brevets faisant référence au méthylphénidate : alors qu’il oscillait entre 1 et 2 par an avant 1995, il saute brutalement à 31 cette année-là pour se maintenir à une moyenne annuelle de 20,5 par la suite (Gorry, Montalban, 2014). La vision organiciste, qui tente de s’appuyer sur les avancées des neurosciences, insiste très souvent sur le rôle supposé d’un déficit de dopamine dans l’étiologie du trouble, dans la mesure où le principal traitement, le méthylphénidate, influe sur la recapture de la dopamine. Pourtant, ce rôle de la dopamine est contesté (cf. ci-après). En tant que nouveau diagnostic, le TDAH a pour effet de distinguer des enfants « normaux » d’enfants « anormaux » ou « malades ». De ce fait, il est considérée de façon critique par les tenants de l’approche psychanalytique, comme par les travaux constructivistes et foucaldiens qui la considèrent comme une modalité pour la société d’imposer un contrôle des sujets, en les réadaptant aux normes de la société, sans questionner ces mêmes normes (Dupanloup, 2001 ; Rumeau-Lung, 2006 ; Frances, 2013).

Encadré 1

Trouble de l’attention ou pas, des pilules à l’école

Le 9 octobre 2012, le New York Times publie en première page un article d’Alan Schwarz intitulé « Trouble de l’attention ou pas, des pilules à l’école » (Schwarz, 2012). Schwarz interviewe un médecin généraliste, le docteur Michael Anderson. Ce pédiatre, lorsqu’il apprend « que ses petits patients de familles pauvres se débrouillent mal à l’école, leur donne habituellement des échantillons d’un puissant médicament, l’Adderall® ». Ce médicament amphétaminique est censé stimuler la concentration et le contrôle des impulsions des enfants porteurs de ce trouble. Bien que le docteur Anderson porte ce diagnostic, il avoue que ce diagnostic est faux et que c’est simplement un prétexte pour prescrire ces pilules afin de traiter ces enfants qui ont une vraie maladie : de misérables performances scolaires dans des écoles inadaptées. « Mais il dit qu’il n’a guère le choix avec toute sa pauvre clientèle du comté de Cherokee, au nord d’Atlanta (Géorgie). Et il ajoute : Nous, la société, nous avons décidé que modifier l’environnement des gosses coûterait trop cher. Alors, il nous faut donc modifier les gosses. » Le docteur Anderson est un des plus véhéments partisans d’une idée qui gagne du terrain aux États-Unis : il faut prescrire des stimulants aux enfants qui ont des difficultés scolaires dans des écoles privées de moyens, non pas nécessairement pour traiter un hypothétique déficit de l’attention avec hyperactivité, mais pour booster leurs performances scolaires. Il n’est pas certain qu’Anderson soit représentatif d’un courant majoritaire. Mais quelques experts pointent du doigt le fait que, de même que les riches étudiants abusent de stimulants pour faire les meilleures études universitaires possibles, les élèves pauvres des écoles élémentaires utilisent des médicaments pour réussir, pour le plus grand plaisir de leurs parents. […] Michael Anderson, au nom de la justice sociale, utilise donc comme d’autres, ces pilules qui procurent souvent un très grand soulagement aux familles. C’est ainsi que Jacqueline Williams se dit très satisfaite de la prescription de Concerta® – encore une amphétamine, plus connue sous un autre nom commercial, Ritaline® – à ses trois enfants qui, même s’ils ne voulaient pas au début prendre ces médicaments, ont fini par comprendre qu’ils amélioraient leurs performances scolaires. Et de plus Medicaid couvre intégralement ses frais de médecin et de pharmacie. Bien sûr, certains experts s’élèvent contre les risques physiques et psychologiques encourus. Mais en 2007 on estimait que 9,5 % des jeunes Américains de 4 à 17 ans étaient porteurs du trouble, soit environ 5,4 millions d’enfants. Un diagnostic du DSM et des pilules ad hoc, quoi de mieux pour faire grimper la prévalence de ce trouble ? Même si ce diagnostic n’est pas posé selon les règles, plus de 20 % des médecins avouant ne se fier qu’à leur seul instinct. Certes, l’addiction guette ces jeunes enfants, lorsqu’ils seront devenus adultes. Et la dépendance aux amphétamines sera toujours là lorsque les symptômes du déficit de l’attention avec hyperactivité auront disparu. Schwarz rapporte l’histoire édifiante du jeune Quintn, un patient d’Anderson, qui, comme ses deux frères et sa sœur, se sont gavés de médicaments dans leur enfance. Quintn a commencé par l’Adderall® vers l’âge de 6 ans du fait de son comportement perturbateur à l’école, ce qui l’a immédiatement calmé et a fait de lui un bon élève. Mais au moment de la puberté, il s’est mis à se battre avec les enfants de sa classe, sous prétexte qu’ils insultaient sa mère, ce que ces enfants niaient. En fait, Quintn avait des hallucinations, effet rare, mais connu, de l’Adderall®. Et il devint suicidaire ce qui nécessita une hospitalisation psychiatrique et la mise sous Risperdal®, un neuroleptique, mais aussi sous clonidine, un antihypertenseur utilisé dans les troubles du sommeil et autorisé par la FDA comme traitement du déficit de l’attention. Interrogé à 11 ans par Schwarz sur les raisons pour lesquelles on lui avait donné de l’Adderall®, Quintn répondit : « Pour m’aider à me concentrer sur mon travail à l’école et à la maison, pour écouter maman et papa et pour ne plus faire ce que j’avais l’habitude de faire avec mes professeurs : les énerver ! » Malgré l’expérience malheureuse de Quintn avec l’Adderall®, ses parents ont décidé d’en donner aussi à sa sœur Alexis et à son frère Ethan, qui n’avaient aucun symptôme de déficit de l’attention avec hyperactivité, simplement pour qu’ils réussissent bien à l’école et parce qu’Alexis était, selon son père, un petit peu barbante. Ledit père, interrogé sur l’utilité de ce médicament purement cosmétique pour Alexis, répondit pour ses enfants sous Adderall® : « Si ça les rend plus positifs, plus heureux, mieux socialisés, si ça les aide, pourquoi pas ? » Cette partie de l’enquête de Schwarz illustre bien, s’il en était besoin, le possible rôle néfaste des parents dans la santé (pas seulement psychique) de leurs enfants, lorsqu’ils sont appuyés par des médecins complaisants et guidés par les seules règles de la compétition sociale et la doxa d’une intégration de leur progéniture à n’importe quel prix. Des éducateurs que Schwarz voulait interroger sur le déficit de l’attention et son traitement ont décliné son offre, reconnaissant plus ou moins que ce diagnostic était problématique. Un directeur d’école de Californie a bien voulu répondre sous couvert de l’anonymat. Il a déclaré que dans son école les taux de diagnostics de ce trouble et d’utilisation de psychostimulants ont grimpé au fur et à mesure que les moyens financiers de l’école dégringolaient. « C’est effrayant de penser que nous en soyons arrivés là. Comment la baisse du financement de l’éducation publique – financement nécessaire pour faire face aux besoins des enfants – a-t-elle pu conduire à cela ? […] Peut-être que ce n’est pas intentionnel, mais ça pourrait bien être la conséquence du fait qu’un médecin, voyant un gosse échouer dans des classes surchargées avec 42 autres gosses et ses parents frustrés lui demandant ce qu’ils peuvent faire, réponde : “C’est peut-être bien un déficit de l’attention avec hyperactivité ; donnez-lui donc ça pour essayer” ». Et le docteur Anderson de conclure : « Peut-être ne connaissons-nous pas bien les effets à long terme de ces médicaments, mais nous connaissons les effets à court terme de l’échec scolaire, qui est bien réel lui. Je m’intéresse à l’individu et à ce qui est bien pour lui maintenant. Je soigne le patient, pas la société ».
Source : Minard (2013), p.395-398. En effet, à partir du moment où une telle catégorie est inventée, elle navigue dans le symbolique et le social et reconfigure la représentation des acteurs et leur perception : il y a toujours eu des enfants turbulents et « inadaptés », mais les classait-on comme malades ou hyperactifs ? Ces enfants sont-ils malades, ou est-ce que leur comportement est le symptôme d’une société qui les angoisse et à laquelle ils essayent de résister, société qui trouve une réponse à ces comportements en les classant comme malades ? Il convient de noter par ailleurs que le diagnostic TDAH est associé à de nombreuses comorbidités, c’est-à-dire la formulation de plusieurs diagnostics pour un même patient : 87 % des patients auraient au moins une comorbidité, en particulier l’échec scolaire, ce qui interroge souvent sur le fait de savoir si les enfants hyperactifs sont en échec scolaire du fait de leur « handicap » ou bien si c’est un sentiment d’échec qui induit de tels symptômes. De plus, la définition du trouble implique que les symptômes de l’enfant soient reconnus au moins dans deux contextes sociaux différents (par exemple la famille et l’école), ce qui fait jouer de fait à l’école un rôle de diagnostic des enfants TDAH, ce qui est fort discutable. Encore une fois, le manque d’attention et la motricité de l’enfant sont-ils liés à une « maladie » réelle ou à la perception du maître et des parents, en difficulté face au comportement de l’enfant ? L’opposition entre approches de la maladie mentale se matérialise entre un monde anglo-saxon, notamment nord-américain, très ancré dans une psychiatrie biomédicale, et la France, beaucoup plus irriguée par la psychanalyse et la psychothérapie institutionnelle, au moins dans le champ de la pédopsychiatrie. Cette différence paradigmatique se reflète aussi dans l’épidémiologie, où le diagnostic apparaît plus fréquent aux États-Unis, où le chiffre de 8 à 10 % est parfois évoqué, que dans le reste du monde, dont la France, où la prévalence serait plutôt aux alentours de 4-5 % [7] . Dans le champ de la médecine en général et dans la psychiatrie en particulier, la position de prescripteur et d’expert de certains psychiatres fait qu’ils peuvent être sujets à des « conflits d’intérêts » entre leur rôle d’expert, supposé neutre, et les relations d’intérêts qu’ils entretiennent avec l’industrie, ne serait-ce que quand celle-ci pratique des essais cliniques. Dans le champ du TDAH, les chercheurs publiant sur le sujet ayant le plus de conflits d’intérêts se situent très majoritairement aux États-Unis, le réseau des auteurs français étant beaucoup plus restreint et moins connecté au réseau mondial (Gorry et Montalban, 2013).
  1. 2. Une analyse comparative France / États-Unis

L’analyse comparative du positionnement, des interventions et des interactions entre les principaux acteurs en France et aux États-Unis (cf. tableau 1) donne des éléments intéressants pour expliquer la différence entre la France et les États-Unis quant au taux de prévalence du TDAH et quant à la prescription de psychostimulants.
  1. 2. 1. L’industrie pharmaceutique

Sur le marché du traitement du TDAH, le méthylphénidate (connu sous les noms de Ritaline®, Quazym® et Concerta® en France) découvert il y a plus de 60 ans en 1954 par Ciba (devenu depuis Novartis) est le traitement de premier rang. Novartis, Shire, Johnson&Johnson sont les principaux producteurs de la molécule. Un second traitement est utilisé dans certains pays, l’atomoxetine, produit par Eli Lilly. Le marché est très développé aux États-Unis, où près d’un enfant sur dix est sous traitement et où le pourcentage d’enfant recevant un psychostimulant est actuellement de l’ordre de 4 % avec des différences très grandes suivant le sexe, les régions et les classes sociales. Le succès de la molécule aux États-Unis s’explique à la fois par les conflits d’intérêt entre les principaux auteurs d’articles scientifiques du champ et l’industrie, mais aussi par le marketing de cette dernière. Si l’industrie pharmaceutique ne semble pas avoir œuvré auprès des experts du DSM pour introduire la catégorie du TDAH, que l’on peut considérer comme une reformulation de troubles pris en compte de longue date par la psychiatrie, elle se saisit pleinement de l’opportunité offerte. En témoigne la concordance entre cette reformulation du trouble dans le DSM et l’explosion du diagnostic aux États-Unis : le diagnostic du TDAH y double en quatre ans (il passe de moins d’un million à plus de deux de 1990 à 1993) alors le volume des ventes de méthylphénidate est multipliée par trois sur la même période [8] . En effet, ces sociétés ont bien entendu pratiqué un marketing et un lobbying important auprès des instituteurs, pour les informer dans la « détection » des enfants TDAH, via la création de sites internet dédiés et en soutenant des associations de patients ou des associations professionnelles pratiquant un lobbying auprès des enseignants d’école primaire (Phillips, 2006). Par ailleurs, il faut noter que la publicité pour les médicaments est autorisée aux États-Unis, quand elle est interdite ou, au mieux, très restreinte en France (réduite à de simples campagnes d’information sur les maladies), ce qui incite les parents de patients américains à demander directement le traitement à leur médecin, alors que la délivrance du traitement ne se fait qu’à l’hôpital en France (avec renouvellement possible en médecine de ville). Quoiqu’il en soit, l’action de l’industrie n’a jamais été « solitaire », mais s’est faite en appui ou comme levier de l’action d’autres acteurs, comme les psychiatres ou les associations de patients. En effet, alors que l’action de l’industrie a été manifeste aux États-Unis, le choix des industriels fut plutôt de rester en retrait sur le marché français, du fait de l’implantation de la psychanalyse dans la pédopsychiatrie et de la virulence des débats entre « pro » et « anti » Ritaline® dans ce champ. Seul Shire s’est contenté d’agir en supportant parfois une association de patients ou des chercheurs, mais le plus souvent en cherchant à faire connaître le trouble plutôt que le traitement. Il faut noter que Shire a financé la seule étude estimant la prévalence du TDAH en France à un niveau proche de celui des USA (Lecendreux et al., 2011), la plupart des évaluations convergeant vers un taux nettement plus faible.
  1. 2. 2. Les associations de familles de patients

Depuis plusieurs années, surtout en pédopsychiatrie, les associations de familles de patients sont devenues un acteur important du champ (Chamak, 2013), y compris dans le travail politique associé à l’établissement des catégories (Chamak, Cohen, 2013). Les pressions exercées par les familles pour obtenir un diagnostic et le traitement associé ont participé au décollage du marché. Le fait de nommer comme maladie des troubles qui perturbent la vie de l’enfant au niveau scolaire comme dans son environnement familial et social a indéniablement un effet rassurant pour les parents d’un enfant agité et en difficultés scolaires. Ces parents sont eux-mêmes en souffrance car dans l’incapacité de trouver des attitudes pertinentes face aux troubles constatés. Indéniablement, le méthylphénidate a un effet immédiat sur l’enfant traité, ce qui réduit les tensions tant à l’école qu’à la maison. Ce peut être d’ailleurs en réponse à une demande plus ou moins insistante de l’école, où le comportement agité de l’enfant trouble la classe, que les parents peuvent être amenés à demander un diagnostic et un traitement au médecin. Aux États-Unis, la reconnaissance du TDAH par le corps médical ouvrant droit à des aides médicales et sociales, particulièrement importantes pour un trouble plus fréquent dans les familles à faible revenu et niveau d’éducation des parents [9] , cela participe à la demande d’un tel diagnostic. Dans ce contexte, les firmes pharmaceutiques ont, sur la base d’un discours éthique sur la reconnaissance du rôle des familles, toute légitimité et tout intérêt à favoriser, y compris par un soutien financier, l’action des associations de familles de patients qui contribue, de fait, à étendre leur marché. Les familles sont ainsi un maillon essentiel d’un champ où différents acteurs (les firmes pharmaceutiques, l’école, les assurances sociales, l’État) interagissent pour la généralisation du diagnostic et du traitement médicamenteux si le lobbying industriel est efficace. En France, c’est l’association HyperSupers qui fut véritablement la cheville ouvrière de la reconnaissance du trouble. Son objectif fut dès le départ (2002) de parvenir à des recommandations du ministère de la Santé et de la Haute Autorité de Santé (HAS) en matière de prise en charge, ainsi que d’informer patients et Éducation nationale sur la maladie, le comportement à adopter vis-à-vis de l’enfant et son traitement. L’association comptait plus de 800 familles adhérentes en 2009 (vraisemblablement plus de 1000 aujourd’hui) et son travail politique a permis en effet l’édition de recommandations par la HAS en 2012. Si l’association ne revendique pas un positionnement ouvertement organiciste ni pro-méthylphénidate, son existence tient aussi à la non-réponse ou aux réponses que les psychanalystes donnaient aux parents, réponses qui leur paraissent ou paraissaient culpabilisantes. Cependant, l’association se montre parfois prudente en ne voulant pas uniquement défendre le traitement par médicament. Si aux États-Unis les firmes pharmaceutiques ont saisi l’opportunité du DSM pour agir sur la prescription du médicament, en France c’est donc plus un travail politique de cette association qu’une « manipulation » de l’industrie qui explique la reconnaissance du trouble et le décollage du marché.
  1. 2. 3. Le rôle de l’école, de l’État et des assureurs

L’État est évidemment un élément important dans la construction de ce marché, par le biais de ses recommandations, des politiques de santé qu’il implémente et par le remboursement, accordé ou non, des traitements. Il est donc l’objet de l’action des autres acteurs qui visent à influencer la prise de décision politique. Ainsi le président du Children and Adults with Attention-Deficit/Hyperactivity Disorder (CHADD) déclare-t-il en 1969 : « L’inclusion du TDAH dans les nouvelles réglementations est un triomphe pour chaque enfant et adulte affecté par le TDAH. C’est une date majeure dans l’histoire de ce trouble car cela affirme le droit de chaque élève affecté par ce trouble à réussir à l’école » (cité par Lakoff, 2000, p. 163). Aux États-Unis, la promotion du méthylphénidate s’est faite aussi par des politiques éducatives et de diagnostic à l’école, ainsi que par le coût apparemment plus faible du traitement des enfants par la molécule que par de longues psychothérapies. Ainsi, les organismes d’assurance-maladie aux États-Unis ont très tôt remboursé la molécule, ce qui a assuré le développement du marché, car le TDAH a été reconnu comme un handicap donnant droit à un supplément familial ainsi qu’à un enseignement renforcé (Mayes et al., 2008 ; Perrin et al., 1999). Cette décision fut précédée d’un intense lobbying de la part des associations de parents (Mayes et al., 2008) dont certaines ont été financées par l’industrie pharmaceutique (Phillips, 2006). De leur côté, les enseignants ont été sensibilisés et incités à détecter des enfants TDAH. En effet, les écoles reçoivent une dotation supplémentaire, variable suivant les comtés, pour chaque enfant diagnostiqué et l’industrie pharmaceutique fournit aux enseignants la documentation (Phillips, 2006). De plus les écoles sont évaluées suivant les performances de leurs écoliers et sont incitées à en accroître le niveau. Une étude comparant les États américains a corrélé le caractère contraignant de ces incitations à la prévalence du TDAH (Bokhari & Schneider, 2011). On ne retrouve pas ces éléments dans le cas de la France où l’école publique semble exercer une pression moins forte qu’aux États-Unis. De ce fait, le diagnostic a littéralement explosé aux États-Unis d’autant que les médecins généralistes américains étant autorisés à prescrire des psychostimulants aux enfants, le diagnostic de TDAH semblant souvent abusif. Ainsi, des spécialistes ont examiné une cohorte de 3082 enfants américains et validé le diagnostic de TDAH pour 8,7 % d’entre eux, mais constaté que 3,3 % des enfants de la cohorte prenaient des psychostimulants alors qu’ils ne remplissaient pas les critères du TDAH (Froehlich et al., 2007) [10] . De même, dans une ville de Virginie, 63 % des écoliers en avance d’un an étaient traités par des psychostimulants (LeFever, Dawson, & Morrow, 1999). Sur l’ensemble de la population américaine, la prévalence du TDAH varie avec le mois de naissance, confirmant ainsi que les écoliers les plus jeunes de leur classe sont les plus exposés (Evans, Morrill, & Parente, 2010). En France, le traitement est resté en prescription hospitalière et était considéré comme un stupéfiant, ce qui en a fortement limité le développement. De plus, le ministère de la Santé était très peu au fait de cette catégorie à la fin des années 1990, si bien qu’il n’existait pas à cette époque de statistiques épidémiologiques consolidées sur ce trouble. Par ailleurs, la faiblesse historique de l’évaluation médico-économique a encore limité le développement de ce traitement.
  1. Les enjeux sociaux du discours scientifique concernant la santé mentale

Ce travail politique en faveur du traitement médicamenteux s’appuie très largement sur le discours scientifique qui contribue fortement à « dépolitiser » la question. Les firmes pharmaceutiques l’ont bien compris qui n’hésitent pas à soutenir financièrement les psychiatres, neurobiologistes, épidémiologistes et autres chercheurs universitaires pour faire des recherches et écrire des articles, ou simplement les signer. Elles mobilisent ainsi des ghostwriters, écrivains fantômes appointés pour écrire des articles élogieux sur tel ou tel psychotrope à faire signer par les précédents, de préférence quand il s’agit de leaders d’opinion. Sans oublier les hired guns, psychiatres généreusement rétribués par l’industrie pharmaceutique pour aider leurs confrères à se faire une opinion – de préférence favorable – pour telle ou telle molécule lors de dîners mondains. Ainsi que les revues scientifiques à comité de lecture qui publient les articles des ghostwriters signés par les grandes plumes universitaires, revues qui, outre la publicité qu’elles peuvent éventuellement publier, touchent des royalties non négligeables de l’achat par les firmes pharmaceutiques de dizaines de milliers de tirés-à-part. Ce système a été largement étudié (Sismondo, 2007, 2009), dénoncé et des règles éthiques de plus en plus sévères sont introduites. Mais une analyse plus approfondie de la médiatisation de la production scientifique révèle d’autres biais qui ne se limitent pas à des questions éthiques, mais qui renvoient à un système structuré, notamment aux questions du financement de la recherche et de l’économie de la publication scientifique. Pour introduire cette question il nous semble éclairant de présenter un article scientifique concernant la génétique TDAH. Cet article est paru le 30 septembre 2010 dans la revue biomédicale réputée The Lancet. Les auteurs ont étudié les délétions et duplications d’ADN chez les enfants souffrant du TDAH (Williams et al., 2010). Ces variations dans la copie de l’ADN, les CNV (Copy Number Variants), sont d’autant plus pathologiques qu’elles sont de grande taille. En effet, quelques CNV avaient déjà été identifiés comme la cause de plusieurs maladies rares souvent associées à un fort retard mental. L’article de Williams et ses collaborateurs rapportait que les CNV de grande taille étaient plus fréquents chez les enfants diagnostiqués comme souffrant du TDAH (12 %) que chez les témoins (7 %). Les auteurs rappelaient d’abord qu’aucune association entre un facteur génétique et le TDAH n’avait, jusque-là, été clairement démontré. Ensuite ils concluaient : « Ces résultats nous permettent de réfuter l’hypothèse selon laquelle le TDAH est une construction sociale. » Or, une autre équipe a repris cette même question et n’a retrouvé aucune association significative entre ces CNV et le TDAH (Jarick et al., 2012), ce qui invalide la conclusion des auteurs. En fait ces auteurs défendent implicitement une dichotomie entre une explication biologique du TDAH et son appréhension plus globale incluant l’histoire singulière du patient ainsi que les contextes psychologiques, sociologiques et culturels dans lesquels il s’exprime. Dans le cadre de cette pensée binaire, seule la recherche biologique permettrait de trancher entre ce qui relève de la médecine et ce qui relève du social. Autrement dit, c’est le discours de la biologie qui est présenté comme faisant seul autorité en matière de santé mentale, participant à la dépolitisation de la question. Du coup, les enjeux qui sous-tendent la production et la médiatisation du discours de la psychiatrie biologique deviennent considérables. Il ne faut alors pas s’étonner de trouver dans ce discours de multiples distorsions, interprétations abusives et médiatisations erronées. Dans cette section nous présenterons brièvement les différents types de distorsion du discours, leurs causes et leurs conséquences sociales.
  1. 1. Les distorsions du discours de la psychiatrie biologique

32La production des savoirs en biologie et en médecine commence par une collecte d’observations, se poursuit avec leur analyse statistique, se prolonge par leur interprétation à la lumière des études déjà publiées et se concrétise par l’écriture d’une publication dans une revue spécialisée. La médiatisation des publications scientifiques, qui échappe le plus souvent aux chercheurs, intervient au terme de ce processus. Nous avons donc entrepris d’identifier et de quantifier les différents types de distorsions qui affectent cette chaîne de production et de diffusion des savoirs.
  1. 1. 1. Collecte et analyse des observations

On oublie trop souvent que tout projet de recherche est orienté par des présupposés. On peut les percevoir en constatant les objets sur lesquels se portent les investigations scientifiques et ceux qu’elles laissent de côté. Ainsi les recherches concernant la biologie du TDAH ont fait une place considérable à une famille de neurones, les neurones à dopamine (1829 publications à la fin de 2013) et ont presque ignoré d’autres familles comme les neurones à histamine (63 publications). Ce déséquilibre en faveur de la dopamine peut s’expliquer par le fait que le médicament de référence pour le TDAH, le méthylphénidate, est connu depuis longtemps pour augmenter la transmission mettant en jeu la dopamine. Il a conduit à l’hypothèse très médiatisée d’un déficit de dopamine supposé être à l’origine du TDAH, alors que cette hypothèse ne repose sur aucun argument scientifique solide (Gonon, 2009). On voit donc que la recherche concernant la neurobiologie du TDAH a été largement orientée par une pratique clinique préexistante. Après le recueil des données, leur analyse statistique peut aussi poser problème. Ainsi une analyse de 461 études recherchant par imagerie cérébrale des anomalies associées à différentes pathologies mentales, montre un excès de résultats présentés comme statistiquement significatifs (Ioannidis, 2011). Plusieurs études soulignent que les recherches en neurosciences ont, de manière générale, une puissance statistique trop faible, car elles reposent en moyenne sur un trop petit nombre d’observations (Button et al., 2013 ; Tajika et al., 2015).
  1. 1. 2. Interprétation et présentation des données

Les chercheurs interprètent leurs observations à la lumière des études déjà publiées. Un biais fréquent consiste à sélectionner dans la littérature scientifique les auteurs en accord avec leur hypothèse et à passer sous silence les faits et opinions contradictoires. Cette distorsion des citations entraîne en neuroscience des dogmes non fondés (Greenberg, 2009). Encore à l’intérieur même des articles scientifiques, la présentation des résultats peut aussi s’avérer largement biaisée. Ainsi nous avons observé dans la littérature scientifique consacrée au TDAH de fréquentes différences entre les données complètes présentées dans la section Résultats et leur présentation partielle dans le résumé et la conclusion. Par exemple parmi les 159 résumés affirmant une association significative entre un allèle du gène codant pour le récepteur D4 et le TDAH, seulement 20 % mentionnent que cette association confère un risque faible ou précisent les données brutes, ce qui conduit à surestimer les résultats ou interdit de se faire une idée de la pertinence clinique de cette association. En effet, cet allèle est présent chez 23 % des enfants diagnostiqués comme souffrant du TDAH et 17 % des enfants témoins, ce qui incite à une certaine prudence dans l’interprétation des résultats (Gonon, Bézard, Boraud, 2011a).
  1. 1. 3. Médiatisation biaisée

Lorsqu’une nouvelle question est abordée par la recherche biomédicale, la probabilité que la première étude publiée soit en fait réfutée par les études ultérieures est très élevée (Ioannidis, 2005). Dans le domaine des maladies somatiques, les études initiales – qui ont été reprises par une méta-analyse – ont été réfutées dans trois cas sur quatre (Ioannidis, Panagiotou, 2011). En psychiatrie biologique, ce taux de réfutation est probablement plus élevé (Button et al., 2013). Cette fréquente réfutation des études initiales n’a en soit rien de choquant du point de vue scientifique. La recherche biomédicale est un processus évoluant lentement : une découverte initiale spectaculaire mais incertaine est suivie par des travaux qui convergent vers un consensus fiable mais le plus souvent de moindre portée clinique. Malheureusement la médiatisation des découvertes biomédicales ne tient pas compte de ce processus évolutif. Nous avons montré avec l’exemple du TDAH que la presse écrite privilégie les études initiales. Elle médiatise beaucoup plus rarement les études ultérieures et ne mentionne quasiment jamais la réfutation des études initiales (Gonon, Konsman, Cohen, Boraud, 2012 ; Gonon, Konsman, Boraud, 2014). La télévision ne tient pas mieux compte de l’évolution des connaissances scientifiques. Nous avons étudié l’ensemble des documents télévisuels présentant le TDAH sur les chaînes françaises entre 1995 et 2010. Les arguments en faveur d’un déterminisme génétique du TDAH étaient encore plus souvent exprimés en fin de période qu’au début alors que les connaissances scientifiques ont évolué dans le même temps en sens opposé (Bourdaa et al., 2015). Or ces informations diffusées par les médias sont les principales sources « objectives » sur lesquelles s’appuient tant les familles de patients que les médecins généralistes, en dehors de celles fournies par l’industrie pharmaceutique. Le vocabulaire utilisé par les scientifiques, en particulier dans leurs interactions avec les médias, peut aussi générer des distorsions flagrantes. Ainsi l’article de Williams et al. mentionné plus haut et rapportant une association entre les CNV de grande taille et le TDAH a été largement repris par la presse grand-public dans les quelques jours qui ont suivi sa publication. La plupart des articles ont cité ce qu’a dit l’auteur principal de l’étude, le professeur Thapar, dans une conférence de presse : « Nous savons depuis longtemps que le TDAH est plus fréquent dans certaines familles, mais c’est la première démonstration d’un lien génétique direct ». Parmi ces 27 articles de presse, 19 ont interprété le mot lien (« link » en anglais) en termes de causalité. Par exemple le Times a titré : “Child behaviour disorder is all in the genes” (Les troubles du comportement chez l’enfant sont entièrement génétiques). L’écart entre cette conclusion et les faits est dans ce cas particulièrement flagrant quand on se rappelle que ces CNV ont été observés par l’équipe de Thapar chez 12 % des enfants souffrant du TDAH et aussi chez 7 % des témoins et que de plus cette différence a été réfutée par une autre équipe deux ans plus tard.
  1. 1. 4. Le rôle des éditeurs et institutions scientifiques dans la médiatisation

Les éditeurs de revues scientifiques prestigieuses reconnaissent qu’ils sélectionnent parmi les études qui leur sont soumises, celles qui ont le plus de chance d’être reprises par les médias (Chew, Villanueva, Van Der Weyden, 2007). En effet, le prestige d’une revue scientifique dépend en partie de l’intérêt que portent les journalistes aux travaux publiés dans cette revue. Afin de faciliter la médiatisation des articles publiés dans leur revue, les éditeurs publient des communiqués de presse résumant les découvertes. Les universités et les institutions de recherche produisent aussi des communiqués de presse pour attirer l’attention des journalistes sur les travaux de leurs chercheurs. Plusieurs études ont montré que la très grande majorité des études scientifiques reprises par les journalistes avaient donné lieu à un communiqué de presse et que le document médiatique est en général fidèle à ce communiqué (Schwartz, Woloshin, Andrews, Stukel, 2012). Par conséquent, lorsqu’on observe un écart entre les découvertes biomédicales et leur présentation dans les média, cette distorsion apparaît déjà dans le communiqué de presse (Schwartz et al., 2012 ; Woloshin, Schwartz, Casella, Kennedy, Larson, 2009).
  1. 2. Les causes des distorsions du discours

Tous les types de distorsions étudiés jusqu’à présent trouvent leur source chez les chercheurs, les processus de production et de publication de la recherche, les éditeurs scientifiques et les institutions de recherche. Les journalistes ne font qu’amplifier des distorsions préexistantes en privilégiant les découvertes initiales et en ignorant que la plupart d’entre elles sont réfutées par les études ultérieures. Tous les types de distorsions qui apparaissent dès les publications scientifiques et les communiqués de presse associés ont pour point commun de survaloriser les observations produites par les auteurs de ces publications. De même, la prime médiatique aux découvertes initiales est influencée par le prestige des éditeurs et des universités. Nous avons en effet observé que les études initiales sont publiées dans des revues scientifiques plus réputées et par des chercheurs travaillant dans des universités plus renommées que les études ultérieures qui les réfutent pourtant le plus souvent (Gonon et al., 2012). Cette recherche du prestige, au prix de distorsions plus ou moins flagrantes, n’est pas seulement due à l’ambition bien humaine des chercheurs. En effet, le financement des laboratoires de recherche dépend de plus en plus de la réputation scientifique de leurs chercheurs (Lawrence, 2003). En outre, la recherche étant de façon croissante financée sur projets, les chercheurs sont poussés à promettre au-delà du raisonnable, puis à présenter des résultats mineurs comme des découvertes de premier plan (Greenberg, 2009). De leur côté, les universités et institutions scientifiques jouent de plus en plus le jeu de la compétition nationale et internationale en renforçant leurs équipes de communication et en incitant les chercheurs à médiatiser leurs découvertes. La médiatisation croissante des sciences biomédicales participe ainsi au vaste mouvement de médiatisation de toute la vie sociale et politique actuelle (Peters, 2012). Alors que la recherche était traditionnellement comprise comme un champ collaboratif échappant à la compétition et à ses lois, elle s’y inscrit de plus en plus avec les contraintes de temps que cela implique. En effet, toute compétition impliquant un instrument de mesure en temps réel, l’évaluation de la recherche se base de plus en plus sur des indicateurs de court terme. L’évolution des connaissances sur la longue durée, qui fait pourtant l’essence même de la recherche, n’est plus prise en compte. Si les chercheurs en neuroscience n’hésitent pas à exagérer l’impact thérapeutique de leurs travaux, cela ne veut pas pour autant dire qu’ils adhèrent tous à cette rhétorique de la promesse. L’interview approfondi de neuf leaders scientifiques et de neuf praticiens dans le domaine des troubles de la personnalité a montré que les chercheurs sont encore plus critiques que les cliniciens quant aux retombées réelles des recherches en neurosciences pour la psychiatrie clinique. Certains interviewés remarquent que ces exagérations quant à l’impact des neurosciences dans tous les domaines ont surtout pour but d’en renforcer l’autorité et que ceci pose des problèmes éthiques et politiques (Pickersgill, 2011).
  1. 3. Les conséquences des distorsions du discours

Les informations neurobiologiques qui intéressent le grand public concernent en premier lieu la santé mentale. Les distorsions du discours renforcent le point de vue selon lequel les neurosciences sont à même de rendre compte de toutes les affections psychiatriques. Cette prétention hégémonique des neurosciences devrait être évaluée à l’aune des résultats attendus du grand public. Or, force est de constater que l’apport effectif des neurosciences à la psychiatrie est mince : aucun marqueur biologique d’un trouble mental n’a encore été validé et les neurosciences n’ont pour l’instant pas permis de découvrir de nouvelles classes de médicaments psychotropes (Hyman, 2010). Les facteurs environnementaux ont une influence majeure sur les troubles mentaux les plus fréquents (anxiété, dépression, TDAH). Même si les recherches en neurosciences les plus récentes permettent d’entrevoir comment les facteurs environnementaux modifient la neurobiologie (Hackman, Farah, & Meaney, 2010), le grand public semble interpréter « une base neurobiologique » d’un trouble mental comme excluant des causes psychologiques et sociales (Pescosolido et al., 2010). La mise en avant des causes neurobiologiques supposées de ces troubles pousse donc à minimiser leurs déterminants sociaux et à ignorer les mesures de prévention correspondantes. Par exemple, si le TDAH est considéré comme une maladie due à un déficit en dopamine d’origine principalement génétique, il n’y a donc pas d’action préventive possible. Or de nombreuses conditions environnementales sont des facteurs de risque pour le TDAH : naissance prématurée, mère adolescente, pauvreté, faible niveau d’éducation des parents (Gonon, Bézard, Boraud, 2011b). À niveau de vie comparable, plus une société est inégalitaire plus ces facteurs de risque augmentent. La prévalence du TDAH résulte donc, au moins en partie, de choix politiques (Gonon, 2011).

Conclusion

Le champ de la santé mentale apparaît exemplaire de l’apport d’une approche en termes d’économie politique analysant le jeu de l’ensemble des acteurs qui participent à la construction d’une maladie et d’un marché à travers leur travail politique. Le cas du TDAH souligne les pièges de la naturalisation des catégories diagnostiques et l’impérieuse nécessité de questionner ces catégories en étudiant la façon dont elles sont construites, diffusées et utilisées. Il montre aussi le besoin de dépasser les analyses qui se focalisent sur le seul rôle de l’industrie pharmaceutique pour appréhender la complexité des actions et interactions d’un ensemble plus large d’acteurs (associations de parents d’enfants, médecins, école, assurance maladie, État, etc.). Ainsi l’analyse du travail autour du discours scientifique relatif aux avancées des neurosciences illustre-t-elle la façon dont les différents acteurs (scientifiques, éditeurs, universités, médias) participent à la dépolitisation des enjeux sociétaux de la maladie mentale. Entre la position naturaliste du mainstream et la posture dénonciatrice (de big pharma ou des dérives éthiques des professionnels), il s’agit de coproduire, avec les acteurs du secteur, des analyses qui n’ont pas pour seule vocation de produire une connaissance académique pour les chercheurs, mais aussi de permettre aux acteurs d’avoir prise sur leur environnement.

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Notes

  • [1]↑– Les différentes sources donnent des estimations variées. L’évaluation la plus récente (Chevreul et al., 2013) considère que 12 millions de Français souffrent de troubles mentaux.
  • [2]↑– Alors que les économistes ont peu investi le champ de la psychiatrie, les sociologues ont depuis longtemps travaillé sur cet enjeu. Voir notamment les travaux de l’équipe santé mentale et sciences sociales du CERMES3 (UMR 8211 – U988) ou l’ouvrage de Lise Demailly (2011).
  • [3]↑– La finalisation en 2013 de la cinquième version (DSM-5) a été l’occasion de la publication de nombreux travaux qui dépassent l’essayisme pour apporter une analyse scientifique de cette dynamique (Gonon, 2013a ; Di Vittorio, Minard, Gonon, 2013 ; Demazeux, 2013 ; Minard, 2013 ; Frances, 2013).
  • [4]↑– Disease mongering est souvent très mal traduit par « façonnage des maladies », alors que le suffixe « monger » signifie « marchand de»
  • [5]↑– Pour un rappel du contexte autour de ce rapport de l’INSERM, cf. Rumeau-Lung (2006) et Collectif Pas de 0 de conduite (2006).
  • [6]↑– Cette hyperinflation concerne aussi d’autres diagnostics en pédopsychiatrie comme l’autisme ou la bipolarité (cf. Frances, 2013).
  • [7]↑– Il faut distinguer trois prévalences. Les enquêtes de prévalence du TDAH recherchent dans un échantillon représentatif de la population générale le pourcentage d’enfant souffrant du TDAH. Aux USA, suivant les études, ce chiffre varie et l’estimation moyenne donne 8 à 10 % (voir Lecendreux et al., 2011). Ensuite il y a le pourcentage d’enfant ayant effectivement reçu un diagnostic de TDAH. Ce chiffre a beaucoup augmenté depuis le début des années 1990. Enfin, il y a le pourcentage d’enfants effectivement traités par un psychostimulant. Ce pourcentage est souvent plus faible que le précédent, mais pas toujours, notamment dans certaines sous-populations aux USA.
  • [8]↑– Source : Physician Drug and Diagnostic Audit, 1990-1994 et International Narcotics Control Board (Gorry, Montalban, 2014).
  • [9]↑– À l’inverse de l’autisme, dont l’occurrence du diagnostic semble plus élevée dans les familles à haut revenu et niveau élevé d’éducation.
  • [10]↑– Ceci renvoie à la question récurrente d’un usage inadapté des médicaments psychiatriques. Cf. Verdoux, Begaud (2006).

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